05 mai 2003
Parfois j'ai la t�te vide. Parfois non, �a vient tout de suite. Travail de m�moire, myst�re. Plusieurs fois par jour des souvenirs me reviennent, � la pelle, comme les feuilles mortes de la chanson, par salves ou par bouff�es, au moment les plus inattendus, en voiture par exemple, � un feu rouge, en regardant traverser une femme ou pendant un entretien avec un patient qui m'ennuie un peu et renforce particuli�rement le c�t� flottant de mon attention. Je ne prends pas la peine de saisir le chemin d'une possible association, je n'essaie pas de comprendre l'irruption, je pr�f�re me livrer au plaisir qu'elle m'apporte et me laisser aller au jeu de ramifications qui peuvent devenir infinies. Par exemple : Festival d'Avignon 1967 avec G* et je ne sais plus qui. Le camping sauvage dans l'�le de la Bartelasse, le soleil qui tape � fond sur les tentes le matin. La travers�e du pont vers les remparts sous le cagna. Presque un calvaire. Le cousin B* S* install� l� comme v�t�rinaire qui se moquait des festivaliers et pestait contre Avignon en hiver parcouru de Mistral. Le d�jeuner toujours au m�me petit bistro d�gott� non loin de la place de l'Horloge. Je me souviens du prix du menu : cinq francs, de la trogne sympathique de la grosse patronne et des salade de tomates et poivrons qu'il y avait tous les jours. Souvenir aussi du caf� La Civette, allez savoir pourquoi. (si, je sais : � cette �poque l�, je fumais. Gauloises, Celtiques.) Le � Petit Train de Monsieur KAMODE � ( Capitalisme Monopoliste d'Etat, grande th�orie du PC de Waldek-Rochet, encore avant George Marchais.) pi�ce d'Andr� Benedetto. Le th��tre du ch�ne noir de G�rard Gelas, assez baba, mais c'�tait l'�poque, mauvaise copie du Living Th��tre. L'ann�e suivante, il fera tout un cin�ma en s'encha�nant avec la troupe du m�me Living Th��tre le long des grilles du Palais des Papes. Les quatre fils Aymon de B�jart dans la cour d'honneur du palais des Papes et Nomos Alpha du m�me B�jart avec Paolo Bortoluzzi. Peut �tre Georges Down, mort bien plus tard du SIDA, dansait-il dans les quatre fils Aymon. Puis en 74 ou 75 avec C*, C* B*, J* C* B*- d�j� - et S* J*. Une tr�s chouette C�lestine mise en sc�ne par Thadd�e Jurado dont je ne sais absolument pas ce qu'il est devenu. Du th��tre off partout, dans des endroits improbables, dans des cours avec des arbres qu'on se d�brouillait pour int�grer au d�cor et c'�tait sacr�ment r�ussi, et la chasse aux chaises : plus une chaise dans Avignon ce mois l�, les vieilles avignonaises se faisaient des c*** en or, si je puis dire. Nous cr�chions dans un dortoir et nous allions trois fois par jours au spectacle. Superbe "As you like it" dont j'ai d�j� parl� dans la cour d'honneur du palais de papes. R�p�tition de la troupe de Merce Cunningham � la chartreuse de Villeneuve les Avignon et superbe spectacle d'Alvin Nikolais dans la cour d'Honneur. Ballades en mob dans les Alpilles. Panne de voiture � Saint R�mi de Provence. Mais quelle voiture? L'ami 6 ou la R5 de parents? Souvenir d'un arr�t prolong� � Saint R�mi le temps de la r�paration, mais ou avions nous dormi ? Camping ou H�tel ? Avions nous m�me pass� la nuit l� ? Et si cela avait �t� au contraire deux jours ? Retour en Avignon depuis : deux souvenirs. Lors d'un congr�s de l'association "Accueils?" moribonde il y a quatre ou cinq ans ou plus... ( j'avais revu avec plaisir F* connu � Moisselles et alors chef de service � Valenciennes, j'avais honteusement �t� dragu� par une psychiatre bretonne, jolie brune tr�s provocante) et il y a deux ans avec le Z*, sur la route du festival de la Roque d'Anth�ron o� nous ne v�mes pas Martha Arguerich, qui une fois de plus s'�tait d�command�e au dernier moment. D�ception dudit Z*, qui �tait dans sa p�riode c�l�brit�s et "�uvres d'art". Martha avait �t� remplac�e au pied lev� par un jeune plein d'avenir, Nicolas Angelish, que bien entendu, le Z* avait trouv� compl�tement nul. Revu aussi Saint R�mi de Provence avec le Z* le m�me �t� 1999. et les baux de Provence aussi : plus rien ne ressemblait � mon souvenir de la panne de voiture. Aix en Provence, go�t de calissons dans la bouche et les platanes du cours Mirabeau. Combien de fois dans ma vie? Une fois avec les parents, dans l'enfance, � peu pr�s s�r (souvenir de la grande place ronde qui pr�c�de le cours Mirabeau quand on arrive dans la voiture de Papa). Une autre fois avec C* tr�s probablement quand nous avions rendu visite � G* C* et D* S* avant (ou apr�s?) la naissance de J*, dans la maison des parents de G* � Rognes (go�t du vin de Rognes dans la bouche et aussi des tomates m�res, souvenir stupide de G* en train de rater une sauce b�chamel inratable). Peut-�tre une fois aussi avec F*, sur le chemin d'Antibes et de la rue Barcancannes, en face de la maison de Pr�vert (Jacques, le po�te) dont l'autre c�t� donnait sur le rempart et la mer ( Souvenirs du March� d'Antibes tout proche et go�t de la Brousse dans la bouche que F* achetait et souvenirs des sardines farcies de la grand m�re de F* aux yeux �trangement brid�s et aux pommettes hautes, comme son fils et sa petite fille, un air de Russe d'Asie.) La maison deux pi�ces par �tage de chaque c�t� de l'escalier avec tout au sommet le "poste de pilotage du "commandant", beau p�re du p�re de F*, ancien pr�fet, ancien directeur de cabinet de L�on Blum. La derni�re fois - souvenir encore parfait - toujours avec le Z*, un soir sans concert � Laroque d'Anth�ron, d�n� dans un improbable resto chinois des rues non loin du cours Mirabeau. Et sous le pont Mirabeau, � Paris coule toujours la Seine et mes amours faut-il qu'il m'en souvienne Sonne l'heure je demeure...(voix de C* dans ma t�te qui chante � merveille la tr�s belle version de L�o ferret.)
03 mai 2003
Merveilles 2
J'irai revoir aussi la vocation de Saint Mathieu � San Luigi Del Franscesci, � Rome. The "Calling" of Saint Mathew. C'est en recherchant une image du tableau sur internet que j'ai �t� mis devant l'�vidence du titre en anglais : "l' Appel". Je n'y avais jamais pens�. D'ailleurs, le tableau le dit bien : le personnage dans l'ombre, � droite, juste au dessous du rai de lumi�re, presque enti�rement masqu� par son serviteur, et dont on ne voit pratiquement que le profil, c'est le Christ. Son r�le est jou� par une sorte de chambellan ou de fondtionnaire de gauche charg� des oublis de l'empereur. Il tend une main fatigu�e, molle et autoritaire. Elle montre un homme d�j� m�r qui compte de l'argent, attabl� avec des employ�s, peut-�tre. Cet homme, surpris, se d�signe, "Moi ? Mais que me veut-on ?" M�me l'ap�tre, le serviteur, n'est pas tr�s s�r que c'est bien cet homme qu' a d�sign� son ma�tre, "C'est bien celui-ci ? Vous �tes s�r ?" J'ai toujours pens� que la "vocation", ("avoir la vocation", pour les "ordres", pour la "m�decine", la "musique"..) �tait quelque chose qui venait de l'interieur, comme une pulsion, qui pousse, en vous. Mais non. Le tableau dit l'inverse : c'est un appel de l'ext�rieur. On vous tire, on vous prend par l'�paule. Un homme venu d'ailleurs, que vous ne connaissez pas, vous d�signe tout � coup, allez savoir pourquoi, myst�re de la gr�ce, et vous suivez, jusqu'� Ormesson, votre vie est transform�e, jusqu'au martyr, il suffit de regarder sur l'autre mur � San Luigi del Franscesci. Un jour dans ma jeunesse, moi aussi, j'ai eu la vocation. Je me m�fie, je sais ce que c'est, enfin, je croyais savoir. La sc�ne se passe de nos jours. C'est un tableau biblique en costumes modernes. D'habitude, chez Caravage, il n'y a pas de d�cor. On ne voit pas le fond. C'est sombre, c'est le fameux "t�n�brisme". Ici, il y a un fond, tr�s peu �loign�, un d�cor de mur avec surtout cette fen�tre aveugle. Elle me fascine cette fen�tre d'o� ne vient pas la lumi�re. Elle semble une pure fen�tre de th�atre, comme dans ces sc�nes de transition, o� l'on joue sur le devant de la sc�ne pendant que sur la profondeur du plateau, derri�re, on s'active pour changer le d�cor de la prochaine sc�ne. Nous ne sommes pas dans une auberge, enfin peut-�tre que si, pas � l'int�rieur mais � l'ext�rieur, alors. Dans la cour, disons. C'est cela, nous sommes dans une cour, � l'ombre. Nous ne sommes pas dedans, mais dehors.On comprend pourquoi alors la lumi�re ne vient pas de la fen�tre. Nous sommes dehors, pas dedans. La fen�tre ne peut donc pas nous �clairer, nous. Elle a assez � faire avec un int�rieur qu'on ne voit pas. Elle n'est pas aveugle, la fen�tre. C'est une fen�tre qui voit, au contraire. Mais elle n'�claire pas notre sc�ne : la lumi�re vient encore d'ailleurs. D'ou vient-elle, alors, la lumi�re ? C'est le Christ qui l'am�ne, la lumi�re, avec lui, c'est pour �a qu'il a l'air si las. C'est la lumi�re d'un dehors encore plus dehors, une lumi�re qui vient peut-�tre de la rue, par la porte coch�re ouverte, � droite, enfin, on ne sait pas. C'est ce rai de lumi�re qui "est" la v�ritable vocation, l'appel. Pas la main molle du Christ. Mathieu est "illumin�". Pas qu'il ait tout compris, loin de l�. Il est illumin� par une lumi�re que le christ, en le d�signant apporte avec lui, presque sans le faire expr�s, bon dieu, encore cette lumi�re, encore une illumination, bon, allon-y puisqu'il le faut : "eh, toi l� bas ! " etc. C'est la lumi�re de Dieu le p�re, soi-m�me, le type au projo, dans la coulisse, celui qui ne fait qu'�clairer la sc�ne.
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Voil� un petit moment que je ne vous avais pas offert un petit lien sympa. C'est maintenant chose faite, non, non, ne me renerciez pas !. Si vous voulez tout savoir sur l'histoire du Sparadrap � travers les �ges, je vous conseille le tr�s serieux site juste au-desous de votre pointeur, oui, juste l�, au-dessous ! Bonne visite !
02 mai 2003
01 mai 2003
Pens�e de la nuit N� 23 : "La main s'ouvre, d�ploie ses doigts vers le dehors. Eclatement, transcendance vers le monde, objet ou sujet, chose ou �tre humain, les doigts ne se referment pas en une prise, en une emprise, en un "main-tenant". Elles restent tendues, ouvertes... Ainsi la main se fait caresse. La caresse s'oppose � la violence de la griffe. La "caresse" est un concept ou plut�t un anti-concept qu'Emmanuel L�vinas introduit en philosaphie, d�s 1947, dans Le temps et l'autre, et qui parcourt toute son oeuvre, jusque dns les textes les plus r�cents : "Cette recherche de la caresse en constitue l'essence par le fait que la caresse ne sait pas ce qu'elle cherche. Ce "ne pas savoir", ce desordonn� fondamental en est l'essentiel. [...] La caresse est l'attente de cet avenir pur, sans contenu." La caresse d�couvre une intention, une moralit� d'�tre qui ne se pense pas dans son rapport au monde comme saisir, poss�der, ou conna�tre. La caresse n'est pas un savoir mais une experience, une rencontre. La caresse n'est pas une connaissance de l'autre mais son respect" MArc Alain Ouakine, M�ditations �rotiques, Essai sur Emmanuel Levinas
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