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29 décembre 2007

Un haïku par bain, 62


S'inonder le crâne
Et gésir dans la pénombre
Solstice d'hiver.

23 décembre 2007

Pensée de la nuit N°128 :"Les génies ont la cervelle deux fois plus grosse que la normale, si t'en manges, tu peux pas tout finir" Jean-Marie Gourio, Brèves de comptoires, L'anniversaire !
Un haïku par bain, 61


Désirs et canards
Souvenirs, flacons, tout flotte
Inexorablement

21 décembre 2007

Je me souviens

de Martin Beck, Le héros des romans de Cheval et Valleux. C'étaient les auteurs, de leur vrai nom Maj Sjöwall et Per Whallö, de polars suédois épatants des années soixante dix. Le polar suédois a bâti sa réputation sur de solides bases sociologiques voire politiquement assez engagées, le style procédural et un hyperréalisme confinant parfois au fantastique. Martin Beck était un flic ordinaire bien qu'extrêmement doué, accrocheur, marqué par les aléas de la vie et par conséquent plein d'espérience. Entre seux enquêtes il consommait son divorce, refaisait sa vie etc. Bien qu'ennemei juré de l'injustice, il n'était pas particulièrement politisé. C'était le narrateur qui était d'extrême gauche. Le lecteur aussi, le plus souvent, à l'époque. C'était un héros brechtien, pour ainsi dire. Ses aventures s'étalaient sur une petite dizaine de romans que nous dévorions en nous les repassant les uns aux autres. Il valait mieux les lire dans l'ordre. Vers la fin, l'enquête en cours s'étalait parfois sur deux romans. Un des volumes commençait par la fin de l'histoire du précedent et finissait sur le début du suivant. Il n'y avait pratiquement pas d'histoire dans celui qu'on était en train de lire. Mais la force de séduction et l'humanité de Martin Beck était telles que nous sentions comme des poissons dans l'eau de la vie du commissariat et celle de son commissaire. L'hyperréalisme le disputait au minimalisme. Et pourtant pas de remplissage, pas de fioriture. Les détails, les sentiments, les personnages, l'ennui, la routine, le train train des jours, tout cela était si tranquillement et minutieusement décrit que nous nous sentions scotchés à ces pages comme s'il s'était agi d'un suspens à la hitchcock. C'est la lecture de la trilogie de "Millenium" de Stieg Larsson et des aventures de son héros, Michael Blomkvist, le super journaliste, dans laquelle je suis enfoui jusqu'au cou ces jours-ci qui m'a rapellé Cheval et Valleux et Martin Beck. Il y a un personnage féminin, qui prend d'ailleurs une importance de plus en plus grande au fil des trois volumes, Lisbeth Salander, qui est des figures les plus originales et les plus attachantes que j'ai rencontré sur le papier ses dernières années. Stig Larsson c'est Cheval et Valleux revisité par Quentin Tarantino et c'est sacrément réjouissant. Si, comme le dit la pub, vous ne faites pas encore partie du million d'accros, n'hésitez pas une seconde, lancez vous, vous ne le regretterez pas ! Et cette pub-là est totalement gratuite !

18 décembre 2007

Coup d'envoi



















C'est la saison des retrospectives : Reuters ouvre le bal
Les 3 chats

Tandis que Babouche, tel l'impossible monsieur Bébé, roule lentement des mécaniques avec des faux airs de Clark Gable, et que Binz joue les figurines du musée du louvre sur le rebord de la fenêtre, Woolite, la petite, assise sur un pouf, se mesure des yeux avec le plecostomus punctatus collé en face d'elle sur la vitre de l'aquarium.

14 décembre 2007

LA BORNE (2004)


La Borne, 2004


11 décembre 2007

je me souviens

d'avoir marché avec C. tard dans la nuit par une belle soirée de septembre 1985 sur la toile épaisse mais soyeuse dont Christo et Jeanne Claude avaient emballé le Pont Neuf. Ce soir-là, on aurait dit que tout Paris s'était donné rendez-vous. Il y avait cette rumeur feutrée des foules nocturnes et un joyeux étonnement dans les yeux des passants surpris par tant de beauté. Des gens qui ne se connaissaient pas se parlaient, on s'interpellait de groupe en groupe. Une lumière étrange de lumignon orangé émanait des réverbères emballés, eux aussi, lanterne comprise. Des groupes s'étaient formés dans les petits balcons ronds qui avaient jadis hébergés des vendeurs ambulants devenus de confortables petits salons privés. On allumait dans l'ombre des briquets, des bougies. On tenait des conciles minuscules, on recevait ses amis, on se penchait pour regarder couler la seine et passer les bateaux mouches bondés.
On se faisait de grands gestes. Nous pensions aux statues du musée du Louvre tout proche. Quand elles partaient pour de longs voyages à l'étranger, quand on les envoyaient pou se faire admirer par les foules tokyoïtes, pékinoises ou new-yorkaises, on les emballait avec attention. C'était toute une science.
On avait pris soin du pont comme d'une chose précieuse, on avait eu des égards pour lui. On avait fait comme un écrin pour chacune de ses pierres. C'était comme si on avait emballé toute la ville avec ses habitants pour la leur donner en cadeau. Nous nous sentions précieux nous mêmes, nous nous sentions aimés, ménagés sous la vôute étoilée au dessus du fleuve qui s'écoulait paisible avec le brouhaha universel de la Ville en fond sonore.

( si vous voulez lire d'autres "je me souviens", je me souviens des "je me souviens", etc. cliquez ici ou encore là ou bien allez vous perdre dans les archives...)

10 décembre 2007

Pensée de la nuit N°127 : "Les cafés sont devenus tellement chers qu'avant de prendre une cuite faut demander un devis" Jean Marie Gourio, breves de comptoir, l'anniversaire (R Laffont)

09 décembre 2007

Un haïku par bain, 60


Une sourde fugue
(On a mis du Bach, en bas)
Atteint mon étuve

07 décembre 2007

Un matin, on se réveille vers quatre heures. On ne se rendort pas jusqu'à l'heure de se lever. On s'est couché très tard la veille. A peine trois heures de sommeil. On ne sait pas ce qu'on a, on n'a pas dormi de la nuit. On se dit que c'est pour ça qu'on se traîne toute la journée. On passe son temps à bailler. On résiste mal aux envies de sieste après le déjeuner. La fin de journée est harassante. On ne pense qu'à se coucher, pour rattraper le rythme. Une bonne nuit et il n'y paraitra plus. Mais arrivé le soir, on n'a plus sommeil. Impossible de se coucher. On tourne en rond, du frigo de la cuisine à la télé du salon. On se dit qu'à ce rythme on ne va pas tenir. On couve quelque chose, mais non. Le lendemain matin, on se réveille à nouveau avant l'aube. On se dit qu'il faudrait bien récupérer de toute cette fatigue. Le week-end suivant on ne fait rien. On essaie de récupérer. On se dit qu'on va faire une bonne grasse matinée. On se réveille encore avant l'aube. On ne récupère pas. rien n'y fait. Et puis cela dure des mois, des années. les fins de journées sont toujours harassantes et les nuits toujours aussi courtes. On sait que la fatigue ne vous quittera plus. On oublie même qu'on n'était pas fatigué. On ne fera plus jamais de grasse matinée. Il n'y a pas de remède. Le pire c'est qu'on s'y habitue. La révolte n'a qu'un temps. On préfère s'asseoir que de rester debout et même les jeunes femmes vous cèdent leur place. On ne monte plus les escaliers quatre à quatre. On ne court plus après les autobus. On a plus de petits matins triomphants. On ne sait toujours pas ce qu'on a. On n'a rien. On est vieux et c'est tout.

06 décembre 2007

Pensée de la nuit N°126 : "Je cherche en même temps l'éternel et l'éphémère" Georges Perec, Les revenentes.

03 décembre 2007

Cinquante ans de modernité, 1


Il n'est pas tout à fait sûr qu'à l'époque où une moitié de la France attendait l'installation du téléphone et l'autre la tonalité, nous ayons imaginé des téléphones libérés de leurs amarres filaires ("filaire" était d'ailleurs un mot qui n'éxistait pas, puisqu'il n'y avait aucun besoin de ditinguer des objets "à fil" et d'autres "sans fil", hormis pour les petite voitures télécommandées). Avant l'arrivée des postes de radio à transistor, à la fin des années soixantes, je ne crois pas que nous comprenions tous la différence entre le téléphone et la radio. Je n'établirai pas avec certitude que nous savions que les sons de la radio ne lui parvenaient en aucune manière par le fil qui la branchait sur le réseau électrique. Dans les années cinquante, il y avait chez nous un meuble radio dernier cri, pour ainsi dire, comme on en trouve encore dans les brocantes. Je me souviens qu'un haut parleur était dissimulé, dans un souci décoratif, dans un cadre photo qui contenait un portrait de moi en barboteuse à un an. Je me souviens aussi de notre premier poste à transistor Grundig que nous amenions sur la plage (à Jesolo sur l'adriatique, plusieurs années de suite) et qui faisaient l'admiration des voisins de parasol. Il était de la taille d'un sac à main, parallélépipèdique avec une anse et recouvert d'une matière plastique beige du plus bel effet. Il était indestructible, il a duré plus de vingt ans jusqu'au milieu des années quatre-vingts. et quand bien même aurions nous imaginé de pouvoir converser avec la terre entière dans ce petit galet noir qu'on tient d'une seule main (vous souvenez-vous des gestes compliqués qu'il fallait effectuer avec les vieux téléphones, le combiné dans une main, collé à l'oreille, et le poste lui même dans l'autre, quatre doigts enfoncés dans l'anfractuosité astucieusement ménagée à cette effet et qui servait de poignée quand nous voulions nous balader dans la pièce en faisant bien attention de ne pas nous prendre les pieds dans les fils toujours emmêlés, ce qui n'était jamais gagné d'avance, et de ne pas trébucher et ainsi lâcher le poste qui ne touchait pas terre que grâce au rapide mouvement vers le haut de la main qui tenant le combiné loin au-dessus de l'oreille et d'où s'échappait la voix angoissée et nasillarde de notre correspondant soudain abandonné seul au monde, avec le poste suspendu au bout du fil qui n'était pas du tout destiné à cet exercice, on revenait en hurlant de loin dans le combiné alors tendu devant notre bouche à bout de bras des "Ne quittez pas !" désespérés, comme si on avait pris une vieille chaussure à la pêche à la ligne, avant de pouvoir reposer le tout sans dommage sur la commode ou table basse qu'il n'aurait jamais du quitter même si nous avions des fourmis dans les jambes ?), quand bien même l'aurions nous imaginé que nous n'aurions jamais, ô grand jamais, prévu qu'il puisse prendre des photos et servir en prime de walkman.