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30 mars 2008

Un haïku par bain, 65


Je rêve à demi
Qu'on a transporté mon lit
Dans une bassine

25 mars 2008




(via Transnet)

Les 3 chats, 2


Binz, sur l'étagère enjambe les bibelots sans même les regarder. Il ne fait rien tomber. C'est un miracle toujours renouvelé, une sorte de grâce. On a envie d'applaudir. Nous serions incapables d'en faire autant, éternels éléphants dans les magasins de porcelaine que nous sommes. La sagesse des chats, contrairement à la turbulence infantile des chiens, nous ravit. Ce n'est pourtant pas que les chats fassent attention aux choses. Ils ne sont pas particulièrement précautionneux, encore moins bien élevés. Ils n'évitent pas les objets. Ils sont en phase avec eux, leur sont parfaitement synchrones. Leur nature, c'est de ne pas émerger. Ils se fondent dans le décor. Ils sont de la même substance. C'est une sorte d'harmonie. Quand un chat avance, c'est comme s'il est immobile. C'est alors la quintessence de l'avancée. Il ne fait pas seulement partie de la nature, c'est la nature même. Nous les humains, en dépit du désir que nous en aurions, n'y sommes pas si étrangers que ça. Dans l'univers, nous sommes de simples choses chaudes. La souris, l'oiseau sont aussi, de leur côté, les éléments indistincts d'une nature continuelle, eux aussi veulent se fondre dans l'indifférenciation des choses. Ils s'efforcent de ne pas exister, de n'être que de simples motifs dans le tapis. Le monde des chats et le monde des proies sont des mondes disjoints et radicalement étrangers. Un chat et une souris ne se croisent jamais. Ce sont leurs mondes respectifs qui entrent en collision en un seul instant catastrophique : celui de l'attaque. Il n'est d'attaque ratée que dans la fiction. Les chats ne sont ridicules qu'en dessin animé. Mais le chat ne mange que les souris, pas les objets de l'étagère. La souris peut arriver à tout moment comme un accident. Un chat, une souris, un oiseau, sont des phasmes, celui qui écrit aussi.

18 mars 2008

Tordant


Que dis-je ? Hilarant ! ...(via Christine G.)

14 mars 2008


Pourquoi n'y avait-il pas déjà un lien vers ces petites choses désopilantes, on se le demande. C'est réparé, cliquez sur le dessin (la jivarisation de Brokeback Moutain est un chef d'œuvre)
26 (titre provisoire), XXIII


Recette du beurre blanc en nuisette vaporeuse : Faites chauffer 10cc de bon vin blanc avec deux belles échalotes concassées. Quand les échalotes ont bu presque tout le vin, incorporez petit à petit des copeaux de beurre ramolli. Montez au fouet jusqu’à obtenir une sauce mousseuse. Passez au chinois. Rectifiez l'assaisonnement. Devinez où est la nuisette
. Haltmann tenait sa recette du beurre nantais d’Alain Lapoule. Celui qu'aux Tarterêts on a appelé un jour Fanfan le Fou. Sa manière à la fois originale et élégante de dealer plaisait. Il prenait tous les risques. Il s'est fait serrer par les flics deux ou trois fois, il a fait de la tôle, presque une année. On l'avait récupéré au 26 complètement fou. Il apparaissait dans les endroits les plus saugrenus, empruntait à certaines patientes leurs tenues de nuit les plus suggestives, les enfilait par-dessus son pantalon et vivait ainsi vêtu au milieu des autres patients qui avaient assez à faire avec leur propre folie pour s'offusquer de celle-là. Il démontait tout ce qui contenait ou conduisait de l’électricité au risque de provoquer des courts-circuits et de s’électrocuter, ce qui est arrivé quelques fois. Il montait sur le toit, refusait de descendre, disait qu'il allait passer une nuit ou deux plus près du ciel, comme le Baron Perché. Mais après trois jours, il n'arrivait pas à descendre tout seul et il fallait aller l'aider à trois ou quatre avec des cordes et tout le tintouin. Ou alors, en montant les escaliers pour aller au premier et en passant devant la lucarne qui l'éclairait, on entendait toc toc : C’était lui qui était sorti par-là en se glissant, avait refermé la lucarne et se tenait tout recroquevillé et contorsionné sur l'étroit rebord à cinq mètres du sol. On voyait sa tête de clown et ça faisait un sacré choc. Pour le faire descendre c'était une autre histoire, repasser par l'escalier aurait été trop facile. Il jouait les équilibristes, mimait la panique, disait qu'il pouvait rester là des siècles, nous faisait tourner en bourriques. Pour finir, il se laissait pendre et sautait sur la pelouse, une fois il s'est bien tordu la cheville. On peut dire qu'il mettait de l'ambiance. On ne savait jamais comment on allait retrouver la maison en arrivant pour notre astreinte le soir ou le matin. Un jour, il avait décidé de faire la "grève totale de l'individu". Il s'était enroulé à la cave dans un vieux tapis avec les pieds qui dépassaient. Il passait ses journées comme ça, sortant de son repère la nuit pour voler à manger dans le frigo quand le contrôleur du gaz était descendu à la cave pour relever le compteur, il avait eu la trouille de sa vie en découvrant qu'au 26 on dissimulait les cadavres, échecs manifestes de la psychiatrie expérimentale, en les dissimulant dans des tapis roulés, avant d’aller à la nuit tombante les jeter discrètement à la Seine. Quand, pour faire un bon mot, il avait quand même demandé, timide et à moitié terrorisé : « Dites, le gars en bas, dans le tapis, il n’est pas mort celui-là au moins » et qu’il s’était entendu répondre assez évasivement sans lever le cul de sa chaise qu'avec Alain on avait l'habitude, il s’était sauvé en courant. Mais ce soir-là, il avait décidé de participer. Il avait donc fait en nuisette sexy devant la cuisinière une démonstration magistrale de la recette du beurre nantais ou beurre Blanc qu’ils avaient d'ailleurs dégusté sur des filets de cabillaud congelé. À cette époque, Il n’avait pas été envisagé une seule seconde de l'hospitaliser. « Je veux dire Francis L. pas le congélateur » ajoutait Haltmann avec un sourire énigmatique. « Le plus extraordinaire dans cette histoire - ajoutait-il encore - était qu’une institution psychiatrique, toute expérimentale qu’elle était, pouvait fournir à ses utilisateurs non seulement tous les ingrédients nécessaires à la réussite d’un vrai beurre nantais dans la tradition mais aussi le plat principal qu’il allait accommoder. Essayez seulement d’imaginer, dans nos modernes UPLI aseptisées, qu’on trouve de quoi confectionner une simple vinaigrette, qu’en plus on trouve la laitue à mettre dessous, où que même, on puisse se dire, rien que se dire : « tiens je me ferais bien une petite laitue vinaigrette » »



13 mars 2008

26 (titre provisoire), XXII



Vingt ans plus tard, Haltmann fut de retour à Dormeil. Le nouvel hôpital était devenu vieux. Haltmann faisait toujours des gardes. Un jour, aux urgences il croisa Alain Lapoule qu'il avait perdu de vue. Ce n'était pas pour lui qu'il venait. Il attendait, dans la salle d'attente, les résultats d'une radio ou d'une prise de sang. Lapoule l'interpella "Salut, Alain !" Ils portaient le même prénom. Haltmann ne le reconnut pas immédiatement. Lapoule était devenu bedonnant, avait le visage bouffi, des rouflaquettes, son accent de titi de banlieue sonnait s'une manière démodée qui n'avait rien avoir avec le parler des cités d'aujourd'hui. Haltmann lui rendit son salut puis ne sut que dire. Lapoule était tout content de la revoir. Il n'avait plus l'insolence de la jeunesse mais il s'adressait à lui sur le ton de la familiarité complice d'antan. Il lui expliqua qu'il était maintenant suivi par un néphrologue pour une maladie chronique qui n'avait rien de psychologique. Haltmann fut à la fois heureux de voir que devenu quadragénaire, Lapoule s'était apparemment sorti du marasme de sa jeunesse et triste de constater qu'il n'avait pratiquement rien fait de sa vie. Ils se retrouvaient tous deux à l'hôpital, chacun d'un côté de la "barrière" et ne pouvaient s'en féliciter ni l'un ni l'autre. Ils restèrent un moment en silence face à face, baissèrent en même temps les yeux, puis ils se dirent des : "bon, au revoir, à bientôt peut-être". Mais ils n'avaient rien à se dire, pas même les terribles moment vécus ensemble. Tout en regagnant le PC des urgences Haltmann se souvint su temps où ils avaient, ensemble, "travaillé du chapeau"


De splendides images de paysages
: cliquez ici

08 mars 2008

A dix mille ans d'ici, les archéologues du futur, descendants de nos descendants, découvrant en guise de squelettes nos serveurs enfouis dans les strates immémoriales et réussissant à déchiffrer les codes qu'ils contiennent, alors aussi mystérieux et énigmatiques pour eux que l'était encore pour nous il y a peu le linéaire b, pourront y lire les innombrables litanies, les confessions infinies, les élucubrations intimes, les sagas minuscules, les vies grandioses, les légendes vraies, les voyages autour des chambres, les explorations d'esprits insondables, les écrans noirs de nos nuits blanches, les graphomanies obstinées, les repentirs, les regrets, les lamentations, les testaments, les jubilations, les colères et les joies de millions et de millions de blogs écrasés les uns sous les autres. Peut être tireront-ils de tout ce magma, de cette excès incroyable de données, plongeant leur regard au sein d'une masse infinie grouillante d'octets, de mots, de phrases et de pensées, l'équivalent d'une caverne de Lascaux ou de deux grottes de Cosquer, tels des diamants hors de la gangue, peut-être sauront-ils dire que nous jouions au tiercé, que nous écoutions France-Info dans les embouteillages et que nous compostions nos tickets de RER. Mais plutôt ne retrouveront-ils rien, brassant à l'infini sans comprendre les données innombrables et inutiles, suites incompréhensibles d'octets , de uns et de zéros, renonçant à ordonner le chaos rampant sous leurs pas, et passant pour le reste de l'éternité à côté de l'homme de Néanderthal.

07 mars 2008

Pensée de la nuit N°134 : "Dix minutes avant de sortir du ventre de sa mère, le bébé range tout" Jean-Marie Gourio, Brèves de comptoir, l'anniversaire (R. Laffont)

03 mars 2008






Pas de blog ce soir, il y a la mort aux trousses sur Arte

(je ne m'en lasse pas, et vous ?)

02 mars 2008

Comme au cinéma






Photo volée au cours d'une balade à Chinatown Paris avec Franklin. et Nathan. Ce ne sont pas des acteurs professionnels, juré !


01 mars 2008

Un haïku par bain, 64


Ma main peut flotter :
La pulpe des doigts se ride
Et le bras dérive...