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22 octobre 2008

Et encore une fois, au milieu de toute cette agitation et de toute cette inquiétude (qui n'a définitivement rien à voir avec la crise), une image d'apaisement et de bonheur fragile. Il fait beau et doux, contrairement à toutes les prévisions. C'est le milieu de mois d'octobre. Avec le père N*, nous descendons à nouveau le Boul'mich à pied, comme des milliers d'autres fois que je n'ai pas toutes racontées ici, mais presque. Nous venons de quitter J* et H* avec qui nous avons déjeuné. Il est rare que nous nous retrouvions tous les quatre en même temps (en dehors des fêtes obligées ou des "grandes occasions") et pourtant, chaque Mercredi, depuis des années je fais cet aller et retour Banlieue-Paris au milieu des embouteillages sans que cela ne m'ai pesé une seule fois. N* et J* (mais surtout J*) sont des hommes à présent. J'en suis fier, même si je n'y suis pas pour grand chose. Je crois que, maintenant rien ne me fait plus plaisir que de constater ça, qu'ils sont devenus des hommes. Avec J*, le taiseux, le ténébreux tout se passe dans les yeux, qu'il a infiniment tendres. Avec N*, le sage, le curieux, le plus jeune, nous jacassons comme des pies, heureux comme des papes tous les mercredi après midi que Dieu fait. Nous les manquons rarement. Il n'y a pas la foule habituelle. Les touristes se sont faits plus rares. C'est parce que les étés indiens n'ont pas chez nous la même réputation qu'ailleurs. On dira qu'on se retrouve un peu entre nous, les latino-quartierains. Pourtant le soleil accroche des reflets au flamboiement des arbres. L'air est plutôt doux, comme je l'ai dit, mais il a déjà cette sorte de cette pureté qu'on peut sentir plus tar en hiver. Nous marchons d'un bon pas sur cette pente douce qui mène au fleuve. En un tout petit quart d'heure, nous rallions la place Edmond Rostand à la place Saint Michel. N* doit acheter des partitions chez Pugno. La boutique du quai des Grans Augustins, rouge écarlate, n'a pas changé depuis cinquante ans. J'y ai moi aussi acheté des partitions, etc. En sortant, la beauté de la Seine et des quais nous saute au visage. En remontant le boulevard, je montre à N* l'emplacement occupé maintenant place Saint André des Arts par une agence automatique de la BNP, de "chez Boubée" (Nérée de son prénom), le célèbre naturaliste, la boutique de curiosités scientifiques où on a pu jusque vers les années quatre vingt, acheter à Paris, des roses des sables, des ammonites géantes, des collections de lépidoptères au détail, des échantillons de coupes géologiques ou des pièces anatomiques en cire, d'un réalisme absolument parfait (on en trouvait encore il n'y a pas dix ans, dans les boutiques de la rue de l'école de médecine) qui ne sont pas étrangères à ma vocation médicale, entièrement anatomique à l'époque où, adolescents, avec mon copain Franklin nous hantions ces lieux avec envie. Nous nous arrêtons, avant d'entreprendre la remontée du boulevard, qui est bien plus physique qu'on ne croit, à la Gentilhommière pour prendre le quatrième café de la journée. En revanche, rien n'a changé ici, hormis la taille de la terrasse qui a toujours été la force de la maison. Ce n'est pas notre café préféré, ni à N*, qui le trouve trop touristique, il n'y a qu'à voir la tête des consommateurs, ni à moi qui préfère largement le Rostand, comme tout ciscoblogger sait, mais l'endroit vaut bien cette petite station : c'est un des rares cafés du quartier à être resté à peu près ce qu'il était il y a quarante ans (et Alain F. habitait non loin, du temps de notre amitié), date à laquelle, par exemple, le "Capoulade" et "le Maheux" qu'on a cru éternels, aux deux coins de la rue Soufflot, furent remplacés qui par un Wimpy (le premier fast food de Paris) puis un Quick et qui par un Macdo qui est toujours là ou réciproquement . Devant les grilles du Luxembourg, face à rue Soufflot, pente Est de la Montagne Sainte Geneviève, la plus douce, et le grandiose panthéon qui la couronne, il y a toujours la marchande de marrons chauds. La petite vieille commence en cette saison à faire ses affaires. N* me dit avec un demi sourire que c'était elle qui me vendait déjà des marrons (et des glaces en été) lorsque j'étais enfant. "Mais non", lui rétorqué-je , c'était son père ! "Donne lui tout de même à boire", dit mon fils.

18 octobre 2008

Un Haïku par bain, 73


Calme catafalque
Où, humide et savonneux,
Un beau pet fait "bllob" !

13 octobre 2008

JARDIN D'EDEN 

La Seine à Corbeil-Essonnes

12 octobre 2008

Vices cachés, 3



J'ai beau lire le plus possible, je ne suis pas près d'avoir le prix Nobel. D'ailleurs c'est faux. Je ne lis pas beaucoup. J'achète beaucoup de livres et je ne les lis pas tous, loin de là, nuance. Aujourd'hui par exemple, c'est dimanche, les librairies sont censées être fermées. eh bien, malgré le fait que je sois de garde à l'hôpital de Dormeil, en arrivant ce matin, j'ai encore trouvé le moyen d'acheter trois livres au "Verger des Muses" qui est la seule librairie ouverte le dimanche à au moins cinquante kilomètres à la ronde (la plus proche étant à mon avis "L'arbre à Lettres" rue Edouard Quenu à Paris, dans le cinquième arrondissement) et qui se situe e
ntre une Boutique géante Babou et un Hyper Animalia sur les rives de l'immense parking de la zone d'activités moche à pleurer qu'on vient de construire aux abords du nouvel échangeur entre A6 et Francilienne. Juste pour laisser imaginer combien de livres, étant ainsi capable d'en acheter trois un dimanche matin en allant au travail au pied d'un échangeur autoroutier en rase campagne, je peux en acheter un après midi de pleine semaine au quartier Latin. J'ai donc fait l'acquisition, pour donner une idée, du dernier Echenoz, "Courir", du dernier Rushdie, l'"Enchanteresse de florence", et de la "Conjecture de Syracuse" d'Antoine Billot que je ne connaissais pas mais dont le bandeau rouge de couverture portait l'alléchante formule "Une vengeance mathématique". Mon gout, si on peut appeler ce dégoutant défaut un gout, pour les mathématiques fera, si vous le voulez bien, l'objet de mon "vices cachés" n°4. (Première digression : jusque là je trouvais les gens de la librairie du "Verger des Muses" héroïques. Plantés au milieu de la banlieue la plus zonarde qui soit ils tentaient de porter le flambeau de la "culture" à deux jets de pavé de la cité des Tarterets avec une modestie et une élégance de doux dingues. Ils avaient fait de leur librairie une sorte d'île enchantée, un havre de paix de calme et de senteurs de colle et d'encre au milieu des discounts de fringues et d'objets de première nécessité. Leur stock n'était pas celui d'un vraie librairie ni même celui de la FNAC, la taille de la papèterie par exemple (avec les images Doodle en tête de gondole), leur très gros rayon scolaire et l'augmentation constante de la taille de celui des activités manuelles montrait déjà les premiers signes d'un compromis inévitable mais on trouvait à peu près toutes les nouveautés et ils suivaient finalement assez bien les suppléments livres de Libé et du Monde. Ils avaient même un élégant bandeau vert pétard portant la mention "recommandé par le Verger des Muses" pour faire cossu qui en faisait quasiment une valeur sure. C'était une très honorable librairie de secours. Ils avaient tout d'une grande... Mais quand ils se sont mis à vouloir ratisser large dans le domaine du "culturel" ("cultiver vos loisirs" qui s'étalait sur les élégants sacs en toile plastifiée qu'ils offraient pour les gros achats était devenu leur nouveau slogan) et qu'ils ont ajouté à leur palette des activités piquées à un "Nature et Découverte" en perte de vitesse ( parfums, gastronomies (thés, cafés, confitures biscuits tant qu'on y était), copies du musée du Louvre et j'en passe) cela a cette fois senti un peu la compromission. D'autant que tout cela ne pouvait se faire qu'au dépends du rayon littérature qui n'est plus à l'heure actuelle qu'une pauvre peau de chagrin. Ils ont maintenant définitivement vendu leur âme, probablement vaincus par les armées de la fripe et de la malvie qui les cernent depuis longtemps. Cela ne m'étonnerait pas d'apprendre qu'ils sont en passe d'être rachetés par ce "Delaveine" du culturel qu'est l'horrible "Cultura" des centres commerciaux de seconde zone qui font d'André Rieux le seul vainqueur des victoires de la musique classique, le "Roi Soleil" le parangon du rayon Opéra et qui sont certains que Max Gallo est académicien (l'est-il ?) et Paul Lou Sulitzer nobélisable) Pour ce qui me concerne, on peut employer le terme clinique d'achats inconsidérés, voire compulsifs, c'est de toute façon passible de la mise sous curatelle. Tout comme la kleptomane qui vole infiniment plus de paires de chaussettes qu'elle pourra jamais en porter sa vie entière même en changeant de chaussettes tous les jours ou même deux fois par jours mais qui ne peut pas s'en empêcher, j'achète plus de livres que je ne pourrai jamais en lire durant le temps qui me reste à vivre même si j'atteins l'âge de Jéroboam. Ils s'entassent sur les rayons de ma bibliothèque, devant les livres déjà lus ou au dessus, couchés en piles de deux ou trois sous l'étagère du haut. Dire que j'en ai pour deux ans d'avance serait bien en dessous de la triste vérité. Il doit y en avoir pour quatre ou cinq, au bas mot. Je suis un assidu des pages livres du "Monde" (que je n'achète d'ailleurs plus, et c'est mon vice caché n°5, que le jeudi) de celles de "Libé" et de "Télérama" (qui me fait penser au "Verger des Muses" ancienne manière) et dans une moindre mesure du "Magazine Littéraire", pas de "Lire" ni de la "Quinzaine", allez savoir pourquoi, mais je pourrais, mais aussi des émissions de France Cul, souvent excellentes comme "A plus d'un titre", "Jeux d'Epreuves", "Des mots de midi", ou "Du jour au lendemain", par exemple, pendant que je tape ces lignes, d'Alain Weinstein avec Hélène Lenoir ce soir. Ces suppléménts littéraires sont d'excellents "digests" de l'actualité des livres. Grâce à eux, comme dit Pierre Bayard dans son livre "comment parler des livres qu'on n'a pas lu ?" - que je n'ai pas lu, justement -on pourrait briller dans les salons à peu de frais ou épater les jeunes filles. Ce n'est pas mon but, même si au demeurant j'adore parler des livres - que j'ai lu - avec mes amis. Je suis comme un collectionneur fou : ce qu'il me faut, ce que je brûle de posséder, ma passion (au sens funeste du terme) c'est la pièce manquante, l'objet "a" de Lacan, bref ce que je n'ai pas et qui me plonge dans les affres du désir. Quand je pénètre dans une librairie chaque livre exposé est potentiellement pour moi celui qui risquerait de me manquer, au cas où, par exemple, j'aurais à tuer le temps dans un vol Paris - Christchurch ou au cours d'une nuit d'insomnie plus interminable que les autres ou entre deux patients sous la lampe au CMP pour me changer les idées. Mais dès que je le possède, la plupart du temps il redevient ce parallélépipède de papier et de carton qui sent la colle et dont je ne sais plus pourquoi je l'ai tant désiré. Il va rejoindre la pile dont je parlais tout à l'heure, peut être le retrouverai -je dans quelques mois. Mais tant que je ne "l'ai" pas, il n'est pas exagéré de dire que je suis rongé d'angoisse. Je me dis bien que j'en ai bien d'autres à lire, qui attendent sous la poussière, des piles entières, branlantes ou impeccablement rangées n'attendent que mon bon vouloir, pourquoi donc celui là ? je peux m''en passer mais non, c'est justement celui que je n'ai pas acheté qu'il me faudra. Les yeux plus gros que le ventre. Un exemple : je résiste en ce moment au dernier Catherine M. au titre si délicieusement ambigu. Mais le livre tout entier n'est-il pas résumé dans l'ambivalence du titre ? Il faudrait que je vérifie de mes propres yeux. Cela me tripote trop. J'ai entendu une interview de l'auteur sur je ne sais plus quelle chaine, j'ai été déçu, je m'étais mis à l'écouter avec une oreille professionnelle et je n'arrivais plus à me détacher du diagnostic que je n'avais pu m'empêcher de poser. Il faudrait aussi que je vérifie mon diagnostic... Je résiste encore, mais je sens que je faiblis malgré le fait que mon copain G. m'a dit lau téléphone lui aussi avoir été déçu, qu'il n'avait strictement rien appris sur la jalousie (qui le ronge lui aussi parfois), il faudrait aussi que je vérifie que le livre de Catherine M n'est pas un manuel de psychologie etc. Quoique j'en dise, enfin, j'en lis tout de même, des livres, mais ce n'est pas du tout autant que j'en ai acheté ou que je désire en posséder. Dans mes rêveries les plus folles, je ne me vois jamais en libraire (Dieu sait pourtant si les librairies ou tout endroit qui possède des rayonnages de livres, grandes bibliothèques universitaires, Beaubourg TGB ou autres, me ravissent les yeux le cœur et l'âme) mais en propriétaire la nuit de la bibliothèque nocturne et parfaite, éclairée d'une simple lampe posée sur un bureau où tout près, dans l'ombre, attend chaque livre, où chaque atome de savoir ou de poésie trouve sa place, se présente à mes yeux avec l'évidence d'un organe interne, où coule mon propre sang, celle dont parle sans arrêt le sympathique Alberto Manguel, où il n'y a qu'à tendre la main, comme au paradis terrestre pour saisir tout le génie du monde. Alors, je ne trouve rien de plus beau que les livres.

09 octobre 2008

Caramba!


Philip Roth a encore raté le Nobel !

06 octobre 2008

Un haïku par bain, 72


Grisaille d'automne,
Et dimanche monotone
flottent avec moi

02 octobre 2008

Fichu métier!




mirifiques Deschiens